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5 juil. 2008

Gorbatchev : choisir entre empire ou démocratie

Lu aujourd'hui un article de Mikhaïl Gorbatchev sur les États-Unis paru dans l'International Herald Tribune.

L'ancien président de l'Union soviétique souligne que le débat américain occulte une question majeure : la militarisation de la politique étrangère du pays. Selon lui, le prisme militaire par lequel l'administration analyse les événements mondiaux déforme la vision américaine du monde et du rôle international des États-Unis, et il n'est pas certain que les candidats en lice changeront cette perspective.

Le déficit public dû aux dépenses militaires est aussi un enjeu colossal qui contraste avec l'angoisse économique répandue dans le pays. Gorbatchev se dit "gravement alarmé par la tendance à militariser l'action et la réflexion publiques". Avec ses plus de 700 bases militaires dans le monde, l'Amérique doit choisir, dit-il, entre empire et démocratie.
Un des correspondants américains de Politique Américaine, basé en Arabie, est plus sévère : "démocratie" ou "ploutocratie impériale" dit-il, se référant à la tendance oligarchique de la société américaine que j'évoque dans mon livre, Après Bush, dans la rubrique "Le pouvoir, les élites et l'argent".

Ce thème de la ploutocratie revient dans différentes analyses, comme celle d'Emmanuel Todd en 2002 (Après l'empire) ou d'Anatol Lieven en 2005 (Le nouveau nationalisme américain) : l'élite détournerait l'attention des citoyens ordinaires des questions de richesse en focalisant le débat public sur guerre et paix, maintenant ainsi sa domination sur la société... Analyse fine mais qui tient trop de la théorie du complot social.

L'article de Gorbachev revient sur les initiatives de désarmement abouties sous sa présidence et celle de Reagan, appelant à une relance du désarmement. Son approche rappelle celle d'Andrew Bacevich dans The New American Militarism, et dans un article paru dans Politique Américaine intitulé "La Véritable Quatrième Guerre Mondiale". En bref, la sécurisation des flux pétroliers du Golfe à prix stable a entraîné une militarisation de la politique extérieure américaine après le second choc pétrolier et la révolution iranienne, qui ne s'est jamais démentie depuis.

Gorbachev s'inquiète de cette dérive, mais il a raison aussi de se montrer sceptique sur un changement majeur de perspective. Comme le remarque notre correspondant déjà cité, il est extraordinaire que le débat entre McCain et Obama tourne autour de leur capacité à être commandant en chef plus que président...

L'Amérique ne changera pas... La patriotisme à la fois naïvement démonstrateur, presque enfantin (les drapeaux aux fenêtres, les pin's obligatoires à la boutonnière, etc.), et militarisé, est devenu un trait culturel dont le prochain président aura du mal à se défaire, y compris Obama.

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