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1 oct. 2008

L'Amérique réelle ?

Le rejet du plan du secrétaire au Trésor Paulson par la Chambre a été un choc pour beaucoup, mais il exprime un décalage entre l'Amérique des cercles dirigeants et le "pays réel".



De même que les forces sous-jacentes à la société américaine font que l'Amérique est un pays très distinct de l'Europe en dépit de points communs considérables, et que les changements attendus de l'après-Bush doivent être modérés, y compris dans le cas d'une présidence Obama, l'Amérique en colère n'a pas été bien perçue par les dirigeants américains, occupés à sortir le pays de l'autre bourbier, celui causé par les dérives de l'industrie du crédit.

Dans son édition internationale, le New York Times écrit aujourd'hui que "les dirigeants à Washington et les observateurs dans le monde, peu familiers des courants de pensée à travers les États-Unis, ont été stupéfaits de voir que l'avalanche d'objections et de ressentiment à l'endroit de Wall Street a été puissante au point de faire dérailler le train de mesures [présenté à la Chambre], du moins temporairement."

Pas de doute en effet qu'un nouveau projet sera soumis après le vote du Sénat aujourd'hui. Mais il est à retenir que la crainte de se présenter le 4 novembre devant des électeurs très remontés contre les puissants de tous ordres, en défendant un plan de renflouement (pas de sanction pour les fautifs) qui aurait dû être baptisé plan de sauvetage (l'économie américaine en danger), à convaincu une majorité de représentants, notamment républicains, de rejeter le plan de l'administration.



Ils se sont en outre moqués des injonctions présidentielles comme de leur première chemise, offrant un exemple "live" du fameux "lame duck president", le canard boiteux qui ne fait plus peur à personne... Cette expression ne veut pas dire que la fin d'ui mandat réduit systématiquement un président à l'impuissance. Dans les circonstances présentes, il est extraordinaire de constater que M. Bush n'ait pas su entraîner le pays et sa majorité. Ses qualités de "leadership" tant vantées aux États-Unis lors de l'invasion (facile) de l'Irak se révèlent être nettement moins performantes dans une situation de crise bien plus complexe comme la crise financière et, probablement, économique.

Les événements viennent affaiblir les chances de victoire du ticket républicain. mais jusqu'ici, une défaite démocrate, aussi incroyable que cela soit, était très probable. C'est que, comme je l'écris dans Après Bush, la force du conservatisme dans la société américaine est sous-estimée.

De même qu'a été sous-estimée par les dirigeants américains eux-mêmes la force du ressentiment contre les dérives du système économique et contre les politiques.
Comme il y a eu coup de sang nationaliste en 2003, le vote du Congrès a représenté un coup de sang populiste. Non dans le sens péjoratif qui est toujours donné à ce mot en France, mais au sens d'une réaction décisive de l'opinion ordinaire - celle-ci d'ailleurs, comme le nationalisme, à tort ou à raison...

L'échec du plan est bien sûr désastreux. Il y aura un autre vote, mais la partie est loin d'être gagnée. Et dans le marasme, quelques signes encourageants apparaissent, comme le rapprochement de Goldamn Sachs et de Berkshire Hathaway, le groupe de Warren Buffett.
Pas assez pour ne pas craindre la suite des événements.

Une chose est certaine, Obama a montré dans ce contexte une compréhension, ne serait-ce qu'intuitive, des problèmes, expliquant l'effet en chaîne qui menace d'assécher le crédit dans l'ensemble du pays.

Obama flirte avec une certain démagogie mais c'est de bonne guerre. L'essentiel de son discours est structuré et argumenté.
Ce qui en fait un candidat nettement supérieur à son concurrent.

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