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26 sept. 2008

La crise financière et le « président » Obama ?

La conjonction de facteurs économiques et politiques extraordinaires vient rendre à la campagne toute la lumière que lui avait un instant ravie la nouvelle des faillites des plus grands banques d’affaires de New York.

Élection présidentielle d’un côté, qui entre dans sa phase la plus sensible avec les premiers débats, et intervention non seulement de l’Etat mais aussi du Congrès, avec l’approbation des mesures proposées par le secrétaire au Trésor ; les événements se mêlent, et l’influence des enjeux économiques sur les enjeux politiques et vice-versa, se joue sous nos yeux.

La difficulté pour le Congrès est de voter un paquet de mesures de 700 milliards pour sauver le système financier, et partant, solder les frais des emballements commis par les établissements de crédit et d'investissement, à moins de deux mois des élections parlementaires (un tiers des sénateurs et la totalité des représentants le 4 novembre).

Le mécontentement des Américains n’a d’égal que leur anxiété qui monte de jour en jour depuis des mois, et que la crise actuelle vient exacerber. Ils sont d’autant moins disposés à régler la note que la situation économique exige des investissements publics importants dans la santé et l’éducation. L’humeur est anti-New-York et anti-Washington.

Les élus sont donc entre le marteau et l’enclume, obligés de répondre à la crise par une action forte, tout en craignant la réaction des électeurs. Pourtant, il était urgent d’agir pour rassurer les acteurs économiques, car le Congrès s’apprête à prendre congé.

Il n’y a pas que le président sortant qui est un « lame duck » (canard boiteux) aux États-Unis ; un Congrès finissant est aussi réduit à l’impuissance pendant les trois mois de quasi-vacance, avant l’intronisation des nouveaux élus à Washington en janvier.




Quelques remarques sur les événements des derniers jours :

  • Pari perdu pour McCain : radio méditerranée international m’a interrogé hier sur la stratégie de McCain et j’ai pensé que son annonce de suspendre sa campagne, comme il avait suspendu la convention du parti pour cause d’ouragan dans le sud, ne lui était pas si défavorable, même si une majorité d’Américains semblait considérer qu’il ne s’agissait là que de « posture » et que le coup n’avait pas vraiment pris. A la réflexion, je crois que le retour négatif de cette approche est plus important et qu’il apparaît non comme le père de la nation rassembleur que cette décision voulait présenter aux Américains, mais comme un politicien qui tente de se refaire et qui manque de flaire. Sa requête de reporter le débat d'aujourd'hui, très insolite, n'a, sans surpise, pas été retenue.
  • Pour la première fois, je pense qu’une victoire d’Obama devient une option sérieuse, ayant toujours pensé que McCain serait élu. Les sondages du jour montrent certes un écart significatif en faveur d'Obama, mais il est clair que le démocrate a su tenir un discours plus percutant sur la crise en soulignant très vite que le manque de liquidités devait absolument être évité, et avec lui la crise de confiance.
  • Obama n’est pas plus que McCain un économiste, mais il laisse voir une préoccupation plus marquée pour les questions économiques que son rival, et ce conformément à l’idée communément admise selon laquelle les démocrates ont un avantage dès qu’il s’agit d’économie.
  • Dans son allocution, le président Bush a mentionné le fait qu’il n’était pas dans ses convictions de soutenir une intervention de l’Etat mais que la gravité de la situation l’exigeait. C’est là une parfaite illustration d'une différence essentielle entre l’Europe continentale et les États-Unis : l’interventionnisme reste très éloigné de la culture économique américaine. Ne pas créer une culture du sauvetage public avait été l’un des arguments de Paulson pour ne pas venir au secours de Lehman Brothers, et les candidats à la présidence ne s’étaient pas empressés de soutenir un « bail out » aux frais du contribuable. Même le langage d’Obama, favorable à une intervention depuis le début, a été précautionneux.
  • Le fait est, indéniable, qu’à ce stade la crise bénéficie à Obama. Cela est réjouissant, mais il ne faut pas s’enthousiasmer trop vite car les hauts et les bas des campagnes sont typiques, et très sensibles aux événements extérieurs. Obama a l’avantage après que Palin l’ait donné à McCain. Attendons de voir les débats et n’oublions pas qu’il reste encore cinq semaines avant le jour-J.


Si un président Obama devait prendre en mains les destinés des États-Unis en janvier 2009, il aurait non seulement tous les leviers du pouvoir à sa disposition avec le Congrès et la présidence, mais aussi une bienveillance aussi forte dans le pays qu’est profonde l’attente d’une rupture. Au plan économique comme au plan international, les cent premiers jours pourraient représenter un moment hautement historique pour l’Amérique.

Un président Obama, porté par la crise financière, serait-il à la hauteur ?

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