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24 déc. 2008

Pas de confiture à Noël pour Washington

Joe Biden, le vice-président élu, est connu pour son sens des formules. Le plan de relance ne doit pas "devenir un arbre de Noël" a-t-il déclaré, prévenant qu'il n'y aurait pas de place pour les "earmarks", ces allocations spécifiques de fonds qui servent des projets d'intérêt local parfois au détriment du bon sens, et dont John McCain est connu, lui, pour être un farouche adversaire.

En d'autres termes, les parlementaires ne doivent pas s'attendre à pouvoir mettre la main dans le pot de confiture pour détourner des fonds fédéraux à usage local. Parole de vieux routier sénatorial, croix de bois croix de fer, il n'y aura pas de "business as usual" au Capitol... Pour un pilier du Sénat, en effet, l'avertissement a de quoi faire sourire, mais peut-être que la nouvelle majorité démocrate du 111e Congrès qui entrera en fonction le 20 janvier, saura résister aux tentations. L'idée que Caroline Kennedy, fille de JFK, succède à Hillary Clinton au poste de sénateur de NY montre que, tout de même, certaines pratiques ne sont pas prêtes de disparaître... Après le fils Bush, la fille Kennedy, alors qu'oncle Ted siège toujours pour le Massachusets. On se demande comment les Américains n'en ont pas marre.

Plus important sans doute est le débat qui se déroule aux Etats-Unis sur le bien fondé de la relance à hauteur d'un trillion de dollars, qui s'ajoute aux 700 milliards du plan Paulson. Beaucoup renâclent au parti républicain, qui ont déjà échouer le plan auto du gouvernement et qui demandent si les fonds du plan Paulson ont produit quelque effet.

Faut-il sauver l'industrie automobile en l'état? Pas sûr qu'ils aient tort de refuser des dépenses dont le bon usage ne les convainc pas. Quant à l'industrie en question, symbole américain, elle est aussi le symbole de la reconversion nécessaire de l'économie et du mode de vie américains. Non que les Etats-Unis doivent se passer d'autos, mais adopter de nouveaux standards - il en a déjà beaucoup été question, notamment en matière de normes d'émission de Co2 au kilomètre - et repenser les transports (cela est plus vrai encore en Europe, car la voiture en ville, cela devient de plus en plus dépassé) s'imposent comme des exigences du futur que seule une crise profonde peurt déterminer. Rappelons que GM a abandonné ses Hummers, ce qui fut un signe important d'un changement de pratique.

Les républicains, qui doivent se soumettre à un exercice de réinvention, ont avec la crise et les discussions sur l'intervention de l'Etat, une occasion d'afficher un discours politique épuisé par les huit années Bush, et aussi une occasion de s'en distancer. Car il y aurait un trait d'union économique entre Bush et Obama, c'est le déficit. Bush l'a creusé pour de mauvaises raisons, avec des baisses d'impôt dont l'équivalent aurait pu être investi, au moins pour partie, dans des investissements publics aujourd'hui au goût du jour (éducation, recherche, infrastructures), et avec la guerre d'Irak. Obama est contraint par les événements et par des tendances de fonds négligées par l'administration sortante (pouvoir d'achat des classes moyennes, emploi, déclassement sur le marché du travail, etc.).

Certaines requêtes, comme celle des détaillants du commerce qui demandent 25 milliards de remise sur la TVA, que l'Etat fédéral paierait aux Etats fédérés qui perçoivent cet impôt, aurait-elles un effet déterminant - comme la baisse de la TVA décrétée au Royaume-Uni?

Bien sûr, on partagera l'avis de Larry Summers: l'Etat doit intervenir pour éviter la plus grave récession depuis la Seconde Guerre mondiale. Mais les préventions de principe sur le gaspillage de sommes colossales et la justification de l'action publique, et les questionnements sur le bon usage des fonds dont devra décider le 111e Congrès en janvier, sont parfaitement acceptables. Miné par Katrina, le parti républicain a là de quoi reformuler un message crédible et reconstruire un avenir politique.

Le déficit existant ne favorise pas l'économie américaine et la perspective de nouveaux déficits, alors que la Fed a dû baisser ses taux à zéro pour tenter de relancer le crédit, impose à l'opposition de suivre de près les fonds alloués pour éviter, comme le dit Joe Biden, que le plan de relance (que le président Obama obtiendra) ne devienne un arbre de Noël.

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