Que penser de cette paire de chaussure lancée (avec adresse) à la face du président américain par al-Zaidi?
L'écho médiatique donné à cet acte est à la mesure de sa rareté. Il y avait eu la chaussure - la sienne - avec laquelle Nikita Khrouchtchev, alors premier Soviétique, avait frappé la table de conférence des Nations Unies pour faire valoir son point de vue, façon moujik. Il y a maintenant le coup d'épaule sportif par lequel un président américain s'écarte de ce lancer de chausse qui est une première universelle.
On peut comprendre la rage du journaliste et la réjouissance que son acte a suscitée dans l'opinion arabe. Cependant, en faire un héros paraît largement exagéré. Certains commentaires approbateurs dans l'audiovisuel français paraissent déplacés. La chose fait sourire, et il est certain que comme président "W" n'est pas aimable. De là à considérer que l'on aurait voulu être à la place de l'Irakien pour quelques secondes est ridicule... Comme spectateur, j'aurais plutôt de la sympathie pour la cible, qui m'a semblé, à cinquante-cinq ans passés, se mouvoir avec une réelle aisance pour éviter le projectile... Certains se souviendront des chaussures, moi du swing du Texan qui a encore quelques belles années de jogging et de biking devant lui - plus vieux peut-être il lira des livres sur l'histoire du Moyen-Orient, mais il sera trop tard.
L'incident ne méritait pas selon moi une telle publicité - inévitable à l'âge du net et de Youtube. Ce qui est important et fut peut commenté, c'est le symbole de la chaussure. Chacun sait que dans les pays arabes, montrer ses semelles représente une extrême offense, d'où la dimension "culturelle" de l'acte. Et surtout les paroles qui ont accompagné cette vengeance, traitant l'Américain de chien pour les souffrances infligées aux Irakiens - là dessus, difficile de contester.
Il y a du sérieux et du dérisoire dans cette affaire; les godasses, le coup d'épaule de "W", le bon-vent outré d'un journaliste applaudi ostensiblement ou en secret par l'homme de la rue (arabe et autre), l'insulte suprême dans le contexte arabe, et le résultat d'une politique désastreuse qui est une ode à l'ignorance et au sectarisme.
Côté dérision, bien que al-Zaïdi a montré de la dextérité, j'ai trouvé Bush assez bon - qui a aussi pris tout cela avec légèreté. Côté sérieux, il ne faut pas trop en faire.
Au total, le lancer de chaussures n'était ni une bonne idée ni un geste digne. Pas de quoi monter l'affaire en épingle. Seulement voilà, la relaxe du pénitent (qui a montré un certain cran et qui a dû en payer le prix en détention par un traitement sévère infligé par de grosses moustaches) va devenir un combat démesuré pour la liberté de la presse. Il mérite, sérieusement, d'être libéré.
19 déc. 2008
L'affaire de la chaussure: Bush bat Khrouchtchev
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Mountazer al-Zaidi
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